Les coulisses du reportage
Par Vincent Gerbet
« Il y a quelques années, j’avais réalisé un long reportage au Palais de la femme à Paris. Je voulais rencontrer et raconter les histoires des femmes, mais aussi des hommes, qui y étaient hébergés. C’est la fondation Armée du Salut qui gère cette structure capable d’accueillir plus de 450 personnes en grande difficulté sociale.
Quelques temps après, un travailleur social rencontré là-bas m’a parlé de l’ouverture d’un foyer pour mineurs non accompagnés, un lieu où de jeunes réfugiés étrangers arrivés seuls en France pourraient y trouver refuge.
Là aussi, c’est l’Armée du Salut qui avait acquis cette résidence située dans le 15e arrondissement de Paris et jusqu’alors occupée par des religieuses.
Je voulais faire un travail sur ces mineurs pour comprendre leurs parcours et surtout découvrir leurs sentiments et leurs états d’esprit, loin de leur pays, de leurs familles…
Puis le temps a passé. C’est finalement deux ou trois années plus tard que je me suis décidé à faire ce reportage que j’avais toujours en tête.
Le sujet m’intéresse toujours et le faire pour DONg ! permet de m’adresser à un public de collégiens en leur racontant des parcours de vies de jeunes tellement différents !
Le contexte actuel me convainc aussi que c’est le moment… Il me semble en effet très important de décrire la réalité des histoires de ces jeunes à l’heure où l’on entend beaucoup de choses sur eux et sur les « migrants » en général. Notamment, de la part de certains hommes politiques… Comme par exemple en disant que tous les jeunes mineurs isolés viennent en France uniquement pour commettre des actes de délinquance et devenir des criminels. Instinctivement, je ne peux me résoudre à de tels raccourcis. Je mesure sans doute combien il doit être difficile de quitter son pays d’origine et que la majorité de ces jeunes candidats au départ ne le feraient pas s’ils n’y étaient pas quelque part obligés.
Après de nombreuses démarches auprès de la direction de l’Armée du Salut, j’ai pu obtenir l’autorisation de réaliser mon reportage.
Cette fois encore, j’ai eu la chance de pouvoir à la fois faire les photos et rédiger le texte de mon reportage. Cette fois encore, j’ai pris du temps pour me faire accepter de ces quelques jeunes qui avaient entre 15 ans et 19 ans et réaliser mes premiers clichés.
J’y suis allé très régulièrement pendant deux mois. J’ai entendu plusieurs témoignages et récits de vie qui m’ont beaucoup marqué, bouleversé parfois.
Je me suis très vite aperçu que la majorité des jeunes n’étaient pas venus en France par choix, mais par nécessité. Que cette même majorité ne montrait que le désir de vivre, tout simplement.
Et que les enfants qui avaient la chance d’atteindre leur but en arrivant en vie en France, seraient marqués à jamais.
Comme me l’a résumé cette phrase inoubliable entendue au Foyer Nazareth : « Si j’avais su que le voyage aurait été aussi dur, je ne serai jamais parti de mon pays… »
Pour aller plus loin :
Un musée
https://www.histoire-immigration.fr/
Des livres
Le Temps des miracles, d’Anne-Laure Bondoux, éd. Bayard
Celle que j’ai laissée, Marie-Françoise Colombani et Clarisse Quillet, éd. Actes Sud
Maintenant je vais raconter, de Mamadou Aliou Diallo, éd. Actes Sud junior